Grazax est le nom du nouveau comprimé de désensibilisation par voie sublinguale au pollen de phléole (Laboratoire ALK-Abello). Ce médicament, nouveau par sa forme galénique et son schéma thérapeutique constitue une avancée dans l’immunothérapie allergénique. C’est le premier médicament pour immunothérapie par voie sublinguale à obtenir une AMM. Il vient renforcer la classe thérapeutique des allergènes disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM), dans laquelle il n’y a à ce jour que les venins de guêpe et d’abeille (AMM 1990, Laboratoire Stallergènes). Jamais un médicament tant attendu par les allergologues n’a déchainé autant de polémiques depuis l’annonce de sa prochaine commercialisation en France en janvier 2011.
Retour sur l’historique : Le Grazax a obtenu son AMM en France le 8 février 2007, par reconnaissance mutuelle européenne. Son concurrent direct, Oralair Graminées (Laboratoire Stallergènes) a obtenu l’AMM en Allemagne en juin 2008 (extension de l’indication pédiatrique en janvier 2009) et l’AMM en France en novembre 2009. Oralair n’est pas encore commercialisé en France.
Le Grazax, a obtenu le 7 novembre 2007 lors de son évaluation initiale par la commission de transparence un service médical rendu faible et un ASMR V et un remboursement à 35%. Le 22 juillet 2009, suite à une réévaluation du niveau de son ASMR après dépôt de données cliniques complémentaires, il a obtenu un SMR faible et un ASMR : IV, mais son remboursement restait à 35%. La commercialisation de Grazax n’a pas pu se faire en 2009 en raison des démarches auprès de la commission économique du médicament et pour des raisons de calendrier pour le démarrage du traitement (2 mois avant la saison pollinique). Le Grazax a ensuite obtenu l’extension de l’indication pédiatrique (5 à 16 ans) le 2 avril 2010. La commission de transparence a confirmé le SMR faible et l’ASMR IV et a donné un avis favorable à son inscription sur la liste des spécialités remboursables, mais à un taux de 15%. Effectivement, depuis janvier 2010, un décret a attribué un remboursement à 15% de toutes les spécialités à SMR faible initialement remboursées à 35%. Cette baisse inattendue de remboursement qui touchait des produits aussi innovants pour l’immunothérapie allergénique a fait surgir un nouvel obstacle à la commercialisation des comprimés d’extraits allergéniques. Un remboursement à 15% des comprimés d’immunothérapie allergénique, signifie une inégalité d’accès aux soins car certains patients ne pourront pas bénéficier du traitement par Grazax. En effet, il y a des mutuelles ne prennent pas en charge les médicaments à vignette orange (remboursés à 15%). C’est l’une des raisons qui fait que les allergologues ont tenté de se mobiliser pour défendre un accès aux soins équitable pour tous les patients. Le deuxième danger vient du risque de baisse du remboursement des APSI, actuellement remboursés à 65%, avec pour conséquence le bouleversement de l’allergologie française. Ce risque pourrait avoir des conséquences néfastes pour les patients, pour les allergologues et pour l’industrie française des allergènes. Le laboratoire ALK-Abello qui a déposé un recours avec des données supplémentaires issues d’études nouvelles et espère pouvoir bénéficier à nouveau d’un remboursement à 35% (voire 30% selon les nouvelles dispositions).
Les allergologues, les syndicats, les associations et sociétés savantes d’allergologie ne pouvaient que réagir devant le sort réservé par l’administration à des médicaments innovants ayant fait la preuve de leur efficacité et tolérance. Comment un traitement de fond de l’allergie, un traitement qui modifie l’évolution de la maladie (disease modifyer pour les anglo-saxons) puisse être remboursé moins que certains traitements symptomatiques.
Interpelés par la prochaine mise sur le marché de Grazax avec un remboursement à 15%, la fédération française d’allergologie (Société française d’allergologie, syndicat des allergologues, Association nationale de formation continue et association de patients) a saisi le ministre de la santé sur ces questions.