Convaincu de l’inefficacité d’une gestion purement comptable des dépenses de santé, la Fédération hospitalière de France (FHF) a publié le 14 décembre 2010 les résultats de la commission de réflexion sur la pertinence des activités médicales lancée en décembre 2009, et présidée par le professeur René Mornex (endocrinologue et doyen honoraire de la faculté de médecine de Lyon). Le président de la FHF, Jean Leonetti propose un changement de méthode, basé sur une véritable maîtrise médicalisée des dépenses. Il précise : « Nous sommes persuadés qu’en faisant ‘mieux’, au lieu de ‘plus’, nous pourrons non seulement contenir ces dépenses, mais aussi améliorer la qualité des soins. Un soin pertinent, c’est un soin adapté, donc efficient, explique ce dernier. Il s’agit de trouver le bon équilibre entre ce que cet acte apporte et ce qu’il coûte, pas seulement en termes de dépenses, mais aussi de risques et de contraintes ».
La commission dénonce de nombreux cas de non pertinence des soins comme le dépistage du cancer du sein ou de la prostate chez des personnes âgées de 80 ans et plus, qui risquent de souffrir davantage des effets secondaires de traitement anticancéreux lourds. De même, 11% des indications de cholécystectomies échappe aux recommandations. Plus de 900 000 radios du crâne inutiles sont réalisées chaque année en France pour des traumatismes crâniens sans complication, sous la pression des patients ou la pression des habitudes médicales non validées. La commission dénonce aussi les cas de non-pertinence liée à un mécanisme de compensation d’honoraires. La seule façon pour les praticiens d’augmenter leurs revenus est d’effectuer des actes techniques souvent inutiles, mais qui permettent de compenser une discipline peu lucrative. La FHF, suggère aux pouvoirs publics de modifier la nomenclature pour mieux coter les actes ‘intellectuels’, et moins bien certains actes techniques.
Enfin, la commission dénonce les «micro-dérives» que sont la prescription d’examens «pour rassurer», mauvaise interprétation de la normalité des dosages, redondance des examens…Ces prescriptions entrainent, selon le FHF, «une dynamique perverse d’enchaînement d’examens inutiles» qui constitue une véritable hémorragie financière.
En allergologie de tels gaspillages existent aussi à travail les prescriptions qui ne respectent pas la NABM, que de nombreux biologistes exécutent pourtant. En 2008, nous avons dépensé 2,76 M€ pour doser des IgE totales (Source Biolam 2008), en grande partie inutile au diagnostic d’allergie. De même, la simple prescription du dosage des IgE spécifiques anti-acarien D. pteronyssinus sans y associer systématiquement D. farinae qui n’apporte pas d’information pertinente, car il y a >90% de réaction croisée entre ces 2 espèces d’acariens, permettrait d’économiser chaque année plusieurs centaines de milliers d’euros.
La FHF appelle aujourd’hui les pouvoirs publics à prendre leurs responsabilités en matière de gestion et d’évaluation de la santé publique et formule dix propositions. Elle préconise d’abord que la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) publie des statistiques comparatives des actes, afin de permettre aux établissements de se situer par rapport à la moyenne régionale et nationale. La FHF préconise un système plus souple de contrôle par la CNAM, pour opérer contrôle médical, basé moins sur la quantité d’actes effectués que sur leur pertinence. Le recours à des groupes de pairs, chargés d’expertiser les pratiques à partir de référentiels permettrait d’aider à l’appropriation des bonnes pratiques.